• Chapitre XI

       Depuis combien de temps marchait-il ? Spyke ne s'en souvenait pas. Il ne s'en souvenait plus. Il regarda pour la énième fois autour de lui. Il n'y avait rien, pas même un sol. Il marchait dans le vide, où tout était blanc. Pas d'arbres pour se reposer, d'étendues d'eau pour se rafraîchir, de plantes pour se nourrir. Il s'assit alors sur le sol et attendit. Il attendait qu'on vienne le sortir de sa prison lumineuse. Mais en dehors, ce n'était qu'une pierre sur le bord de la route, gravée d'avertissements. Et personne ne venait le libérer. Il était seul, il était fatigué et il en avait marre.
    - SAUVEZ-MOI !!!

     

       Spyke se réveilla dans la pénombre. Le silence l'oppressait, tout comme les murs qui l'entouraient. Et ce n'était pas des murs qui l'entouraient, mais plutôt les contours de la statue. Il était de retour dans la statue gardienne.
       Mais Spyke n'en pouvait plus. Il avait déjà été enfermé pendant un millénaire, il ne pouvait pas se retrouver de nouveau pris au piège. Il ferma alors les yeux pour trouver un moyen de sortir. Soudain, une idée lui vint. Le Cotorl se concentra et chercha son épée par la pensée. Elle était à quelques pas de la statue. Il réussit à lui donner assez de puissance pour qu'elle puisse détruire la statue et leva la main doucement. L'arme suivit le geste et s'éleva. Spyke fit alors plusieurs mouvements de la main et l'épée trancha la statue. Il sortit des décombres et récupéra son arme.
    - Tu n'es pas assez puissant pour me priver de ma liberté ! lui lança-t-il.

     

     

     

       Shiryu était prisonnier des statues des filles. Il était à la merci du moine, il le savait. Il baissa alors la tête, comme s'il ne voulait pas voir ce qu'il allait arriver. Le moine prit donc sa lance et, après avoir pris de l'élan, couru vers le Démon en criant.
    - Rejoins tes ancêtres, Démon !
       Mais alors qu'il passait au-dessus de la cape de Shiryu, il s'immobilisa. Le Démon émit un long rire diabolique puis expliqua pourquoi il s'était arrêté.
    - Tu es tombé dans mon piège, petit imbécile ! Si tu regardes bien, je n'ai pas posé ma cape n'importe comment.
       Le moine regarda à ses pieds. La cape formait un cercle l'entourant.
    - Si seulement tu avais pensé à regarder où tu marchais, tu aurais pu voir que j'avais tracé des formes autour de ma cape.
       Le sol était recouvert de trous et de débris. Mais si on observait bien, on pouvait voir que la cape était le centre d'une figure géométrique plutôt étrange.
    - Kartugo ovinmil lagtru uopbesi ifga at tolmif ! cria-t-il.
       À ces mots, les pupilles de Shiryu disparurent et ses yeux devinrent noirs. Les débris de statues lévitèrent, tournant sur eux-mêmes, tandis que les orifices créés par les explosions des boules de feu de Shiryu s'illuminèrent, formant un immense pentagramme ayant le moine pour centre. Les débris s'alignèrent au dessus des trous et, lorsque le Démon ferma les yeux, ils tombèrent dans les trous lumineux. Il prit une profonde inspiration, comme pour emmagasiner de l'énergie. Les trous illuminèrent toute la salle, aveuglant le moine immobile. Puis, d'un coup, Shiryu relâcha sa respiration en ouvrant les yeux. Il fixa son adversaire. Un grondement se fit ressentir à travers le sol. Soudain, comme sorties des entrailles de la terre, de gigantesques colonnes de pierres s'élevèrent des trous et se rejoignirent en un point : le centre de l'étoile. Du sang gicla. Des morceaux de corps se mêlèrent aux débris de statues. Les cinq colonnes s'affaissèrent pour reboucher les orifices. Il ne restait, à l'emplacement de la cape de Shiryu, que des flaques écarlates. Celui-ci était pris d'un fou rire démoniaque.
       Il ne s'arrêta que lorsqu'il se rappela qu'il était encore retenu par Roxane et Shannon.

     

     

     

       Allongé sur le sol, je me tenais le ventre. Le coup m'avait assommé et je voyais des petites étoiles un peu partout. Ma respiration était saccadée. Derrière moi, j'entendais des bruits de fracas, de combats. Spyke et Shiryu se battent encore, pensai-je.
       Je regardai du côté de Spyke. Une imposante statue arriva derrière lui et l'enferma dans son corps. Quant à Shiryu, le moine s'élança vers lui tandis que deux statues retenaient le Démon.
       Je trouvais les statues familières. L'une avait de longs cheveux et un beau visage fin. Je reconnu Shannon. Donc ce qui voulait dire que l'autre statue était...
        Roxane ! Ils osent utiliser les corps de mes amies ! Ils vont me le payer !
       Je n'avais, tout d'un coup, plus mal. La colère m'empêchait de ressentir autre chose. Un phénomène étrange se produisit : une aura blanche recouvrit mon corps entier. Je me relevai et offris à mon adversaire un visage sans expression, et pourtant je ressentais une colère immense. Il passa d'une expression victorieuse à de l'étonnement puis à de la peur. Il s'éloigna de moi, mais cette colère avait décuplé mes forces. À moins que ce ne soit l'aura blanche.
       Je ramassai mon sabre et me déplaçai à une vitesse fulgurante vers le moine. Il se retourna et je lui assénai un violent coup dans l'épaule droite. Il changea de nouveau sa peau en pierre et mon sabre ne lui fit rien. À peine avait-il reprit sa forme normale que je le frappai de nouveau. Là encore, il ne sentit rien. Je pris alors mon deuxième sabre et alternai les coups pour qu'il n'ait pas le temps de se changer en statue. Sur toutes mes offensives, seules deux le touchèrent : sur sa cuisse gauche et sur son bras droit. Il lâcha son bâton magique après s'être changé entièrement en pierre. Mes assauts ne le blessaient plus.
       Je rangeai un de mes sabres et fis alors quelque chose que je n'avais encore jamais fait. Je pris le sabre restant avec mes deux mains et concentrai mon énergie dans celui-ci. Je voyais la lueur blanche m'entourant couler jusque la lame et emplir la salle de lumière. Je m'avançai doucement vers le moine et, en un coup de sabre, je lui coupai le bras gauche, comme on coupe une viande tendre. Il redevint normal, cria et tomba à terre. Je me mis au-dessus de lui, le bras prêt à s'approcher, le sabre prêt à sectionner sa gorge. Il avait peur, je pouvais le sentir. Son cœur s'affolait. Soudain, une silhouette féminine se profila devant la grande fenêtre devant moi. La lumière de la lune créait un contre-jour qui m'empêchait de bien voir qui c'était.
    - Vas-y ! Tue-le ! m'ordonnait-elle.
       Je ne répondis pas. Sa voix était douce et de plus en plus forte. Elle se rapprochait.
    - Qu'est-ce que tu attends ? Il va s'enfuir !
       Le moine commençait à reculer. Le femme se rapprochait. J'apercevais maintenant de long poils autour de son cou et, dans la pénombre, des yeux de bête me fixaient. Ses yeux.
    - Dépêche-toi de lui trancher la gorge !
       Alors que je me résignais à le laisser en vie, trop occupé à observer la femme qui s'approchait de moi, l'homme blessé me donna un coup dans le tibia et me fit tomber. Le halo qui m'entourait faiblit tandis que je perdais l'équilibre. Je chutai sur le moine et mon sabre se planta dans son cœur.
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